AU TRAVAIL QUÉBÉCOIS! Vite dans vos lycées!
TUNISIE I : PREMIER séjour en 1965-67
UNE COMMUNAUTÉ CLOÎTRÉE
EN ATTENDANT...REPOS, LOISIRS et ANGOISSE
Semaine du 25 au 30 septembre 1965
Dans le chapitre précédent, nous mentionnions les pressions issues du Ministère de l'Éducation nationale de Tunisie pour nous présenter sur les lieux d'affectation professionnelle. Sans autos pour plusieurs, sans résidences pour personne encore, sans effets personnels qui dorment au port de Tunis, les coopérants-professeurs partent chacun dans une direction pour se présenter chez leur proviseur de lycée, laissant femme et enfants à l'hôtel TRANSATLANTIQUE...non sans inquiétudes pour eux, ni sans appréhension sur ce qui les attend sur place chacun, ville inconnue!
À CHACUN SA DÉBROUILLARDISE
À défaut d'un mode de transport personnel toujours inaccessible (voir la rubrique précédente), chacun des nôtres fit appel à son audace et imagination pour cibler le moyen qui lui convenait...ou lui restait disponible.
Les plus chanceux furent ceux qui avaient été affectés dans la même ville comme SOUSSE, MONASTIR et BIZERTE. Ils purent louer un taxi exclusif pour une journée complète pour lequel ils partagèrent également les frais. Heureux collègues! Mais, pour la plupart des autres, il fallut faire appel au système D en effet pour atteindre le poste d'affectation. Le car pour certains, le taxi-groupe pour le reste des autres.
Quant à moi, étant affecté à BEJA, à la frontière tuniso-algérienne, j'optai pour le taxi, le plus rapide des modes pour cet aller-retour! Ouf! Vous dire le ridicule de mes efforts pour m'approprier une poignée de porte afin de me réserver une place dans le taxi... Souvenez-vous qu'on ne pouvait jamais réserver de place à bord; tout au plus fallait-il courir au milieu des quémandeurs sur le taxi qui arrivait pour déposer la main sur une poignée de porte...Je n'eus franchement aucun succès! Je vous le dis, en toute humilité! Finalement, après plusieurs tentatives infructueuses qui me firent manquer plusieurs taxis consécutifs partis sans moi, un bon samaritain tunisien m'offrit de se substituer à moi pour mettre rapidement la main sur la poignée...ce qu'il réussit à faire du premier coup. J'appris vite qu'il me fallait, en retour, mettre la main dans mon porte-monnaie... Bel apprentissage! D'ailleurs, il en fut de même en fin de journée pour mon retour à Tunis... que je n'aurais pas voulu escamoter, vous l'imaginez bien!
VISITE à BÉJA et IMPRESSIONS PREMIÈRES
La randonnée vers la ville de BÉJA fut lente et longue. La destination n'était pourtant située qu'à 90KM de TUNIS. Mais la route était tortueuse, l'auto-taxi alourdie par la sur-capacité habituelle des transports publics (personnes additionnelles, surplus de bagages et traction fatiguée) et les odeurs intérieures, tout cela ensemble fit de ce voyage un cauchemar qui me faisait déjà appréhender mon affectation récente et même le retour de fin de journée...pour lequel je n'avais aucune garantie d'ailleurs! Nous finîmes par y arriver, néanmoins!
Toute en collines et vallées, la ville de BEJA me parut grande et peuplée. Mais, je constatai ultérieurement, lors de voyages touristiques, qu'elle renfermait de vastes espaces inoccupés, à cause des pentes accidentées et terres rocheuses. Sans savoir tout cela, je vous avoue que le premier coup d'oeil ne suscita aucun enthousiasme chez moi! D'autres observations subséquentes allaient m'expliquer le pourquoi de tout cela.
RENCONTRE de COURTOISIE avec le proviseur du lycée
Débarqué du taxi au centre-ville, je me fis dire que le Lycée de Garçons et Filles était situé en dehors sur cette colline que vous voyez là-bas.... Pas de taxi disponible! Je me trouvai obligé de parcourir tout le trajet.
Le bâtiment me parut austère et en plus ou moins bon état. Était-il bien équipé pédagogiquement
, que je me demandais déjà? Après quelques demandes d'informations pour accéder au bureau du proviseur, on me conduisit plutôt chez l'intendant, sorte d'administrateur financier n'ayant aucune autorité, ni compétence pédagogique. Après l'avoir salué courtoisement, je lui fit connaître mes origines et comprendre les raisons de ma visites. Il transmit immédiatement mes attentes au Proviseur qui daigna finalement me recevoir sur-le-champs.
Le premier responsable de l'Établissement me reçut froidement, je dois dire! Timidité excessive? Indifférence à mon égard? Toujours est-il qu'au bout de quelques minutes, il aboutit à 2 offres inattendues, compte tenu de la fadeur de sa réception et bienvenue à mon égard!
D'abord, il m'offrit de me présenter en classe dès le lendemain matin sans savoir ma fonction ni pouvoir définir la nature de mes tâches. Ne sachant comment répondre à une offre aussi saugrenue que vague, j'esquivai tout engagement immédiat, prétextant à juste titre qu'il me fallait tout de même rentrer sur Tunis, ne serait-ce que pour quérir mes effets personnels.
Ensuite, comme pour me faciliter les choses, il m'offrit d'aller visiter, avec son intendant qu'il venait de convoquer, une jolie villa disponible et située sur une colline. Pour manifester ma bonne foi, j'acceptai vite son invitation qui allait me mener à mon établissement domestique plus rapidement que tous les autres coopérants qui se morfondaient déjà à l'hôtel qui nous paraissait plus minable après plus de 3 semaines déjà...
Nous partîmes donc, l'intendant et moi.
MA CABANE à BÉJA
L'intendant, peu bavard, conduisait prudemment à travers les rues tortueuses et accidentées de la banlieue de BÉJA qui m'apparaissait déjà peu conviviale, j'avoue! Mais, je ne pouvais être négatif puisque j'avais accepté une affection de coopérant en Afrique... Je n'avais pas le choix, évidemment! J'observais le paysage, les maisonnettes qui se faisaient plus nombreuses à mesure que nous arrivions au centre-ville. Puis, mon guide continua et traversa la ville. J'en conclus vite que nous avions maintenant franchi l'autre versant de la ville. Nous escaladions déjà l'autre colline, les maisons se faisant aussi espacées et rares qu'au début, en quittant le lycée. Elles me paraissaient même pauvres et démunies.
Était-ce ici le quartier dans lequel j'allais rester? Avec une épouse enceinte de 4 mois, devant accoucher 5 mois après, en février plus précisément?
Allions-nous, me disais-je, habiter une de ces villas délabrées et isolées? Avec quels services! Plus que de l'appréhension, c'est la peur, pour ne pas dire la panique qui me tenaillait l'estomac!
MISE K.O. AU COMBAT
L'auto s'immobilisa devant une maison des plus simple. Mon intendant, ne trouvant vraisemblablement pas la maisonnette recherchée (oublions la villa mentionnée précédemment!), voulait sans doute obtenir des précisions pour la repérer. Une femme voilée se trouvait la porte. Il semblait la connaître puisqu'il la salua spontanément et avec assurance. Après quelques mots avec elle, il se retourna vers moi, m'invitant à descendre et à le suivre.
J'étais désemparé et consterné à la fois, je crois! C'était donc ma villa, ma maison, le foyer de ma famille! J'eus peine à me traîner jusqu'au seuil de la porte, car je venais d'apercevoir un espacement de 18cm au pied de la porte...et autant, sinon plus, à son faîte! L'air entrait donc en bas et en haut?
, que je me suis dit! Pas possible! Cette porte conduisait sans doute à une cour intérieure, du style arabe que l'on connaît dans l'architecture orientale....
On ouvrit la porte pour la visite officielle. Un long couloir donnait au fond sur une cuisinette. LE TOUT À CIEL OUVERT! Imaginez! Ce n'est pas tout! De chaque côté du couloir, quelques portes s'ouvraient sur des chambres et une mini-salle, style salon/boudoir pour les rassemblements familiaux sans doute. Pas de W.C., si ce n'est une toilette arabe.
NON! C'en était fait de mon affectation à BÉJÀ
, que je me suis dit. Je ne saurais venir habiter ici sans risquer le bien-être et la santé de ma famille et de notre futur enfant à naître.
Je fis tout pour écourter la visite, prétextant que je devais rentrer sur Tunis (ce qui était d'ailleurs vrai aussi bien dans ma tête que dans mon coeur!).
UN RETOUR JOYEUX SUR TUNIS
Je ne saurais vous dire la joie et la satisfaction de chercher un taxi-groupe, de trouver et payer un assistant pour mette la main sur la poignée pour réserver ma place.
Je n'eus guère conscience des odeurs douteuses dans le taxi, de la longueur du trajet de retour, de l'entassement des passagers.
Mais, croyez-moi, quel plaisir ce fut de débarquer au centre-ville de TUNIS pour courir à l'hôtel TRANSATLANTIQUE, aussi inconfortable était-il devenu! J'eus vite fait d'oublier cette journée difficile!
J'avisai l'Ambassade du Canada, à Berne, dès le lendemain, des constats de ma visite ainsi que de ma décision irrévocable, leur demandant une autre affectation plus convenable. On était d'accord! En plus, l'Ambassadeur en personne annonçait sa visite impromptu pour régler les problèmes d'affectation qui n'avaient pas abouti à leur solution!
Il ne me restait plus qu'à attendre et espérer des jours meilleures avec une nouvelle affectation.
TIVON
TUNISIE I : PREMIER séjour en 1965-67
UNE COMMUNAUTÉ CLOÎTRÉE
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