La Loire en canoë: de Sully/s/Loire à Chalonne/s/Loire
Carnet de voyage dans les Pays de la Loire




La Loire en canoë, au fil de l'eau entre Sully sur Loire et Chalonne sur Loire.
Patrimoine mondial de l'Unesco depuis l'an 2000, sur un territoire de près de 280 km entre Sully sur Loire et Chalonnes sur Loire, le Val de Loire ne peut que faire rêver et permettre de remonter deux mille ans d'histoire en descendant, en 20 jours, la Loire en canoë: de l'habitat troglodyte au siècle des lumières, des villes historiques aux "Châteaux de la Loire".





Le 04 avril 2010
001 PREPARATION DU 01-04 AU 20-05-2010
Tout est encore dans la préparation, façon Guide du Routard pour commencer (vous connaissez: les "où manger?", "où dormir?", auxquels nous rajoutons, les "où se mettre à l'eau?" et autres "où en sortir?").Mais le plan se précise, les étapes sont presque toutes gravées dans le marbre et les embarcadères / débarcadères sont tous identifiés depuis Google Earth (magnifique): de la mise à l'eau à Sully sur Loire, en passant par Jargeau, Fourneaux, Beaugency, Ménars, Veuves, Montlouis, Langeais, Chouzé, Gennes, La Daguenière, La Possonnière, Saint Florent le Vieil, à la sortie d'eau à Champtoceaux, soit environ une trentaine de kilomètres par jour. Le "River Book" identifiant les ponts (quelles arches semblent navigables?), les barrages (passage à droite, à gauche ou sortie de l'eau?), les centrales nucléaires et la supposée dangerosité (vue du ciel) de tel ou tel passage est en cours de finalisation: à confronter bientôt avec la réalité.
Prévu également le principe de la voiture suiveuse, sorte de bivouac ambulant (sur le canoë, cela permet de naviguer léger et, principe de précaution, de garder quelques affaires au sec) chaque arrêt s'effectuant à moins de 3 km d'une gare ou d'un arrêt de bus, permettant ainsi un retour rapide au point de départ de l'étape afin de la récupérer... et de pouvoir chercher un hébergement pour la nuit (ce périple est frappé d'une interdiction familiale de camping sauvage: ramer, oui! galérer, non!).
Le canoë? Un Sit-On-Top "Ocean Quattro", baptisé Vindilis, en fait plutôt un kayak: solide, stable mais... un peu lourd et qui quittera la Méditerranée où il naviguait en père peinard, sanglé sur le toit de la voiture équipé de deux "frites" faisant office de galerie.
Reste à affiner le choix des sites remarquables à visiter, autres que ceux dits naturels et faisant de fait parties du voyage ...
Et à donner le premier coup de pagaie, vers le... 21 mai 2010.
Voir le récit avec photos et commentairesDe Sully-sur-Loire à Jargeau, le 21-05-2010
C'est ici que tout a commencé, au pied du château de Sully, sur une Loire large et qui a fait son plein d'eau lors des épisodes orageux de ces derniers jours.
Et c'est d'ici que sera donné le premier des milliers de coups de pagaies qui se succèderont jusqu'à Chalonnes-sur-Loire. Pour un démarrage rive nord, le premier coup est porté côté droit, pour engager l'avant du kayak dans un courant assez fort et qui nous emporte rapidement: ce qui tombe plutôt bien, c'est que nous allons dans le même sens!
Très vite, la civilisation s'efface et ne reste bientôt que le fleuve et ses hautes berges pleines d'une vie insoupçonnée. Et cet éclair bleu, là, au raz de l'eau, qui pourrait se confondre avec une grosse libellule tellement il brille, c'est le martin-pêcheur, puis deux et bientôt trois...et encore des sternes, hérons comme s'il en pleuvait, des oies, bernaches ou pas, ainsi que des mouettes, goélands et autres cormorans. Mais où est donc le castor?
Le temps est au beau fixe, le vent léger, une petite grève, une halte!
Mais tout d'abord, la carte du périple, à regarder encore et encore, ce premier soir au camping de Jargeau, après 28 kilomètres(3h30) d'une navigation sans grande difficulté.
Voir le récit avec photos et commentaires003 De Jargeau à Beaugency, le 22-05-2010
Le départ de Jargeau se fait vent arrière par beau temps et au milieu des gabarres, dans un jus assez fort: vent plus courant, autant de promesses d'une étape facile!
Jusqu'à Orléans, les rives sont magnifiques, bordées de massifs d'iris d'eau et sans y avoir jamais été, font penser à ces reportages que l'on peut voir sur de grands fleuves comme ceux d'Amazonie ou du Canada.
Déjà, au loin, se dessine Orléans et la cathédrale Sainte Croix.
A Meung-sur-Loire apparaît la première difficulté: le vieux pont! Un vieux pont, c'est comme un barrage sur la Loire, tant les piles sont rapprochées. Juste avant le pont, la Loire se cabre, gonfle et se hausse d'un petit mètre avant de s'engouffrer entre les piles, les forts courants formés de droite et gauche se croisant sous l'arche dans un clapot infernal! A peine le temps d'entendre, dans ce grondement de cascade, une voix livide venue de l'avant "t'es sûr qu'il fallait passer là?", que déjà la machine s'est emballée sous l'arche et qu'il faut pagayer à s'en faire péter les tendons.... Surtout rester droit, ne pas dévier, surtout ne pas se mettre en travers... Ça chahute dur, rame, rame encore... Ouf, c'est passé, mais quelle éclaboussure! Un "je suis trempée" pas trop lointain arrive de devant: a priori, tout le monde est encore à bord!
A Fourneaux, le Loiret nous rejoint: bienvenue. Reste à glisser tranquillement jusqu'à Beaugency, pour conclure une belle étape de 48 kilomètres(6h30).
Mais où est donc ce foutu castor?
004 De Beaugency à Blois, le 23-05-2010
Il fallait s'y attendre! Les kilomètres d'hier se payent aujourd'hui: mal partout! Quelques coups de pagaies remettront tout ça en ordre, après le pont de Beaugency, passé au petit matin.
Après Saint Laurent des Eaux et sa centrale nucléaire (petit portage pour éviter le barrage), la navigation continue au milieu des renoncules et des oies sauvages, qui, par colonies entières de 20 à 50 bêtes s'envolent lourdement à notre approche, courant à fleur d'eau pour faciliter le décollage, leurs bruissements d'ailes tenant plus du bruit d'une mécanique mal entretenue.
Après le château de Menars, et avant Blois, la Loire s’élargit et le courant se dilue dans l'immensité du fleuve, et moins de courant, c'est plus de pagaie.
A Blois, le passage du vieux pont est pire que le précédent! A peine passée l'arche précédée de son "t'es sûr qu'il fallait..." et suivie de son "je suis trempée", voilà qu'un déversoir vient compléter le parcours: chute d'eau sur une forte pente, environ 1 mètre de denivelé. Ça passe. Jusqu'où la chance peut-elle être poussée?
En tout cas, pas jusqu'au camping, il est fermé! Va pour le suivant, mais après 30 kilomètres, c'est pas top!
Personne n'a encore vu le castor?
Voir le récit avec photos et commentaires005 De Blois à Chaumont, le 24-05-2010
Au départ de Blois, la rive gauche paraît propice à une navigation tranquille. Seuls les saules pleurant des larmes de sève et d'eau mélangées offrent, sous leur frondaison, un abri au soleil de plomb qui sévit ce matin. Le courant est bon, juste besoin de quelques coups de pagaies de ci de là, pour une descente de 18 kilomètres bien reposante, dont la mécanique musculaire a bien besoin!
En quittant Blois ce matin et en arrivant à Chaumont-sur-Loire, puis au camping.
Toujours pas vu le castor!
Voir le récit avec photos et commentaires006 De Chaumont à Mont Louis, le 25-05-2010
Le ciel est menaçant et le vent est debout, c'est à dire qu'il s'est levé et qu'il est de face, que les marins me pardonnent! Très belle randonnée malgré tout, pendant laquelle nous avons enfin vu le castor.
Un vrai coup de pot, luxe inouï, mais pas pu le photographier, vision trop fugitive de cette boule de poils gris détrempés, dents sorties et qui a plongé dans les dix secondes, queue plate battant l'eau.
Et voilà qu'arrive Amboise et un vieux pont, de nouveau. Après un changement d'arche au dernier moment, mauvaise idée, le kayak est mal dans l'axe et tout va de travers. L'arrière du canoë est pris par le courant alors que l'avant en sort, veut passer devant, passe devant sous l'arche et se retrouve pile face à la pile, en sens contraire, curieusement immobile, les flots bouillonnants défilant de droite et de gauche. Le "je suis trempée" est remplacé par un "qu'est-ce qu'on fait là?". Alors d'abord, il faut avoir l'air content de soi suite à une manœuvre parfaitement exécutée et sourire, car il y a du monde sur le pont. Ensuite, et toujours très dégagé, petit coup de pagaie arrière gauche, puis avant droit histoire de remettre l'avant dans le courant et vogue la galère!
Le ciel apprécie la performance et libère un gros grain.
007 De Mont Louis à Langeais, le 26-05-2010
33 kilomètres et 5h30 de pagaies, toujours avec un fort vent de face: après 6 jours de navigation, il n'y a plus un muscle qui ne se rappelle à notre bon souvenir!
Quelques habitations troglodytes après Montlouis-sur-Loire, la Loire se décide à traverser Tours, et coule paisiblement sous le pont Mirabeau, s'élargissant puis se resserrant à l'approche du pont Wilson, celui-là même dont la fiche Loire C14 dit: "Visualisation préalable obligatoire, portage conseillé, passage à gauche possible mais déconseillé". Allons, que d'histoires pour un pont, et puis ces guides, c'est toujours mal fait... Choisir son arche... foncer, le plus vite possible... "t'es sûr qu'il fallait....".
Trop tard... En 3 secondes, tout est enregistré, le déversoir de deux mètres sous l'arche, les trois vagues successives d'un mètre pour en marquer la fin, rapprochées, obstinément immobiles, hautes, à l'arête tranchante, et après, seulement après, les vagues croisées et le petit courant salvateur qui nous éloignera du pont et des remous. Mais déjà le kayak s'emballe dans la pente, s'envole sur la première vague, plonge droit au cœur de la deuxième et se transforme en sous-marin, nos deux têtes faisant office de périscopes, émerge (merci le kayak auto-videur) pour passer la troisième alors que déjà les vagues croisées commencent leur gigue, droite ,gauche, droite, gauche. "Je suis trempée" auquel répond un "moi aussi", mais pas trop fier: c'était chaud!
Après le pont Napoléon, c'est décidé, petit arrêt pour se remettre de nos frayeurs. Il n'était pas mal fait ce guide, finalement! Quoi? Recommencer? JAMAIS!
Juste après Tours, le Cher nous rejoint, pourtant, l'eau ne manque pas. Ah! Voilà Langeais: un joli château qu'on ne voit pas de la Loire, dans une ville qui ne le mérite pas. Camping à Bourgueil et concert antillais, les grenouilles sont de sortie!
Le pont Wilson s'est effondré il y a 32 ans, au mois d'avril, alors que les conditions de courant et de hauteur d'eau étaient similaires à aujourd'hui.
Voir le récit avec photos et commentaires008 De Langeais à Port Boulet, le 27-05-2010
Quelle galère pour cette étape de 21 kilomètres normalement très relax! Du pont de Langeais jusqu'à La Chapelle-sur-Loire, une mauvaise conjonction d'un fort vent de face et d'une Loire large et droite, juste dans l'axe d'un vent défiant le courant, forme des vagues de 50 cm réduisant à rien ou presque notre avancée. Trois heures durant, le clocher de La Chapelle-sur-Loire, visible à dix kilomètres, semble ne jamais vouloir se rapprocher! Et il faut déployer des ruses d'Iroquois pour naviguer au plus près de la berge, dans de petits courants au milieu des roseaux, à l'abri relatif du vent, tandis que la Loire blanchit sous l'écume, nous sous le harnais et les jointures de nos articulations sur les pagaies.
L'Indre fait maintenant flot commun avec nous et nous avec le Bourgueil, étape où nous campons de nouveau, moulus de nos 200 kilomètres déjà parcourus.
Voir le récit avec photos et commentaires009 De Port Boulet à Gennes, le 28-05-2010
Tout de suite, c'est l'embouchure de la Vienne, à Candes-Saint-Martin puis le château de Montsoreau, dans une dernière longue boucle de la Loire.
La Loire s'étale et défile maintenant lentement, parsemée de bancs de sable à peine immergés et quelques raclements de la coque signalent la moindre sortie du chenal. Elle est tellement large, au moins jusqu'à Saumur, avec tellement de bras, que souvent son tracé n'apparait plus clairement, et qu'en se perdant elle nous perd, naufrageuse involontaire obligeant à d'incongrues marches à pied dans une eau heureusement chaude, enfonçant jusqu'à mi-mollet dans des sables délités qui pour peu se voudraient mouvants.
Une arrivée spectaculaire sur Saumur!
010 De Genne aux Ponts de Cé, le 29-05-2010
Encore 50 kilomètres et nous touchons au but. Le fleuve est maintenant désespérément droit et large, la vie sauvage s'est éteinte, les îles sont grandes et habitées, et de plus le temps est maussade. Mille et une raisons pour avancer, sans état d'âme! Il fait froid et la fatigue se fait maintenant bien sentir. Par bonheur, au bout de l'allée, le club de kayak des Ponts-de-Cé offre l'abri, la douche et le chauffeur pour l'arrêt de bus!
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