En Laponie suédoise, sur la Kungsleden.
Carnet de voyage en Laponie suédoise
Adeptes de la petite et moyenne randonnée,Michèle et moi avions parcouru pendant une vingtaine d'années à peu près toutes les pistes des Vosges,de la Petite Pierre à Masevaux.Nous rêvions d'une expédition plus importante en pays étranger.La Suède nous paraissait le lieu idéal pour tester nos capacités de résistance au "rucksac".Notre choix s'arrêta sur la Kungsleden,la "Piste royale" longue de 500km mais dont le tronçon Kvikkjokk-Saltoluokta semblait particulièrement à notre portée.
Le 13 mars 2007
Gonflés à bloc
Venus la veille en repérage depuis jokkmokk,nous avions garé notre caravane sur le parking à côté du départ de la Kungsleden,vite rejoints par d'autres caravaniers Suédois animés des mêmes intentions.
Sept heures:c'est le réveil des braves .Le soleil qui ne s'est pas couché de la nuit ,est déjà haut et réchauffe la pièce.Un solide petit déjeuner puis je prépare les sacs à dos,notamment la nourriture pour plusieurs jours ,car il n'y a pratiquement pas de ravitaillement possible sur notre piste.A 9 heures ,je descends à la station de montagne racheter une bonne dose d'antimoustiques:ils sont matinaux et déjà voraces.Une fille à lunettes pèse au crochet-balance, son sac à dos qui a l'air énorme:14 kgs.Elle ne parle pas français ou très mal.Nous échangeons quand même quelques mots.Son mari arrive:ils sont Belges,flamands et vont à Abisco.A 9heures 30 sac pesé(24kgs),nous partons.Les deux Belges partent dans la même direction, mais avant nous.Nous les verrons toute la journée et même le soir à l'étapeierre et Veerle sont de Gand.Bref...
Les moustiques nous adorent
Michèle a un petit sac à dos,pas trop lourd mais mal commode:tout le linge de rechange et le nécessaire de toilette.La piste commence assez bien:large et plane,on se croirait en Alsace sur le GR5.D'un seul coup elle monte sec;de gros blocs de pierre affleurent partout, tous les 20cm et sur près de 7 km .Nos pieds glissent entre deux et nos chevilles sont mises à rude épreuve.Heureusement, nous avons ce qu'il faut en cas d'entorse, même une gouttière de marche.De plus,une vraie canicule.Le soleil nous rôtit la face et on ruisselle de sueur.Pour éviter les piqûres de moustiques,nous nous sommes tartinés avec du produit local réputé efficace,mais la sueur le dilue,alors les bestioles se régalent avec notre peau bien tendre.Des milliers de volatiles forment un petit nuage gris-foncé autour de la tête de Michèle.Je suppose que ce doit être pareil pour moi,je les distingue vaguement derrière ma moustiquaire.C'est vrai que nos casquettes à moustiquaire achetées à la station de montagne avant le départ nous sont bien utiles, mais quelle chaleur la-dessous.C'est la Piste infernale et notre randonnée lapone a un petit air d'expédition tropicale.A 13heures il nous reste encore une dizaine de kilomêtres à parcourir.Les bretelles de mon sac à dos neuf commencent à me cisailler les épaules;on dirait que je me suis fait avoir par le vendeur et je vais certainement aller lui dire deux mots à la rentrée.Nous longeons un petit torrent.Son murmure est pour nous une invitation à profiter de sa fraîcheur:nous posons nos sacs pour une pause
Voir le récit avec photos et commentairesEn route pour la
L'eau du torrent est limpide et fraîche et nous en profitons sans compter. Après une demi-heure,nous reprenons la piste sous la chaleur et les piqures, aux mains surtout.Des planches posées au sol nous permettent de traverser des sortes de tourbières,larges clairières au milieu d'une forêt de petits conifères. Nous y croisons un randonneur isolé qui nous dit venir d'Abisco, loin vers le Nord. Seul son visage est protégé par une moustiquaire.Ses jambes et ses bras nus sont en sang, couverts de piqures qu'il a sans dout grattées.Nous arrivons enfin sur un plateau et une brise bienfaisante nous raffraîchit, tout en faisant fuir nos ennemis ailés. Sur la gauche apparaît un superbe lac bordé de montagnes ornées de plaques de neige qui ont l'air récentes.Pierre et Veerle,nos deux jeunes Belges sont assis sur la rive et nous font un signe amical avant de repartir.Mais la fatigue se fait sentir ..Nous nous arrêtons de plus en plus souvent; pour boire surtout. Heureusement j'ai emporté deux grandes gourdes que nous remplissons au fil des lacs et torrents rencontrés. Hélas,pendus à l'arrière du sac ,un des gobelets s'est détaché et nous buvons donc à même la gourde. Eau potable garantie paraît -il..La piste commence à descendre ,tant mieux car nos jambes et nos épaules souffrent. Nous pensons à la bonne douche bouillante qui nous attend à la "Stuga". Enfin,celle-ci nous apparaît au loin,mirage du chalet sombre sur le vert clair de la végétation. Le gérant nous attend,prévenu de notre arrivée par les jeunes Belges,sur place depuis peu.
Voir le récit avec photos et commentairesAu refuge de Porte
Nous approchons du refuge tant esperé:une petite construction basse au milieu des fleurs roses,entourée de verdure,édifiée sur une sorte de langue de terre qui s'avance sur un lac.Depuis la porte, la vue à l'entour est magnifique et nous mesurons notre chance d'être là dans ce paradis, au milieu de cette nature, intacte et paisible.La tente de Peter(Pierre ) et Veerle est déjà plantée à proximité.Le gérant nous informe des usages du refuge.A notre demande d'une bonne douche chaude,il nous montre le lac.L'eau pour la boisson est également à puiser au lac mais pas au même endroit.Les eaux usées seront déversées à une centaine de mêtres à côté des WC.Nous devrons fendre le bois,balayer, récurer, faire le ménage à fond...pour seulement 670 Sek, soit 70 Euros pour la nuit.Une paille ! Plus cher qu'au Novotel et sans le p'tit dèj.Nous sommes écoeurés et nous pensons aux sept prochaines nuitées jusqu'à Nikaluokta.Le gérant,bon prince, veut nous refiler une carte du Touring club suédois pour 410 Sek,afin de payer moins cher.Là, nous flairons la grosse arnaque et décidons d'abréger notre expédition dès le lendemain.Mourrant de soif,au moyen d'un grand seau en inox,je vais puiser de l'eau fraîche au lac, en veillant bien à ne pas me tromper de côté.Peter me demande l'autorisation d'en boire.Quelle question!En effet ,m'explique t-il,étant allé moi-même puiser l'eau,cette dernière m'appartient.Voilà un aspect de la notion de propriété que nous ignorions;mais bon...Tout en discutant avec nos compagnons de route,je fais griller quelques patates au lard qui embaument la pièce. 22heures :un bon bain dans l'eau glacée du lac nous regaillardit mais nous ne flemmardons pas sur la rive car les moustiques veillent.23 heures,extinction des feux.Les lits sont à une place et superposés mais nous ferons avec.Nous sommes seuls dans la "Stuga". Pas de moustiques non plus car j'ai bricolé un petit appareil qui est efficace:une bougie allumée sur laquelle j'ai retourné une boîte de conserve vide au fond percé.Posée sur la boîte, une tablette antimoustique est chauffée par la bougie à travers le métal ,elle dégage des vapeurs qui repoussent ou exterminent les bestioles.Ca marche.Nous essayons de dormir sans penser à demain.
Voir le récit avec photos et commentairesUne sage décision.
La nuit ne fut pas très bonne.En m'endormant,je voyais encore des centaines de moustiques tourbillonner au-dessus de moi.Réveillé à 6 heures,je buvais mon café,seul dans la pièce ,pensant avec amusement à nos enfants qui ne se doutaient pas de ce que leurs "vieux" étaient en train de vivre.Par la fenêtre,je voyais Peter et Veerle,tente pliée,prêts à partir.A 7 heures ,j'appelais Michèle pour le petit déjeuner.A 9 heures toutes les corvées étaient faites:vaisselle,balayage,récurage,eaux sales vidées,eau potable disponible pour les prochains arrivants,lits faits...Après nos adieux aux deux jeunes Belges,nous repartions sur nos pas,avec appréhension car nous savions la piste difficile.Par bonheur,le ciel semblait se couvrir.Avec un peu de chance,nous aurions moins chaud.Nous marchons d'un bon pas ; pourtant la piste monte un peu mais est moins accidentée .Les moustiques étaient toujours là,affamés,attendant eux- aussi leur petit dèj.Ils attaquaient surtout dans les endroits où le vent ne soufflait pas.Aujourd'hui,ils nous piquaient même à travers pantalon et maillot.Nous tenions un bon rythme de marche et à 13 heures 30,nos dix kilomêtres étaient parcourus.Nous faisons halte au bord de la piste,à un croisement avec un sentier pour motoneiges,marqué d'un X rouge fiché sur un piquet.Un peu plus loin,cette piste s'interrompt au bord du lac pour reprendre sur la rive opposée.C'est vrai que pendant les 6 ou 8 mois d'hiver le lac est gelé ,donc praticable avec des véhicules.Trempés de sueur par l'effort,nous nous abritons du vent frais pour déguster nos cailles rôties préparées avant de partir de notre camp de base.C'est ma foi excellent et on apprécie la nourriture,le paysage,le calme qui nous entoure ,conscients des difficultés que nous aurions rencontrées en poursuivant notre objectif premier.Encore quelques kilomêtres et nous apercevons en contrebas,flottant plus haut que la cime des arbres le drapeau suédois hissé dans la cour de la station de montagne de Kvikkjokk.Nous arrivons à bon port,ravis de l'aventure,mais un peu déçus quand même.Pour nous remonter le moral,chemin faisant,nous élaborons déjà des projets pour l'an prochain.Mieux préparés,mieux équipés,tenant compte de l'expérience de cette année,le succès sera sans doute au rendez-vous.
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