CAMBODGE "SUR LES TRACES DU CYCLOBARANG"

Carnet de voyage au Cambodge

PREMIERS TOURS DE ROUES DEVANT ANGKOR THOM

L'esprit de l'aventurier.
"Lhomme moderne commence à rayonner partout depuis 60000 à 70000 années, il atteind chaque coin de la planète, prouvant ainsi sa capacité à s'adapter aux milieux les plus divers et, pourrions nous dire également, un certain sens de l'Aventure" écrit Luca Cavalli-Sforza, l'un des maîtres de la génétique des populations.
Une aventure est un défi personnel.C'est une occasion qui comprend aussi des dangers. L'aventure est inspirée par un défi venu du fond des âges, les instruments impliqués, bateaux, avions ou tout autre moyen de locomotion ne sont que des accessoires.
Nous sommes peu nombreux à relever le défi, même si, enfants, nous avons rêvé tous de l'aventure avec un grand A. Qu'est-ce qui rend donc ces adultes qui réalisent leurs rêves, si différents des autres?
L'aventure possède sa mythologie, chaque coin du monde a son flot d'anecdotes les plus folles, propres à faire rêver hors des sentiers battus ses arpenteurs desperados. Certains passent à l'action, les autres bien qu'ils soient atteints du virus se contentent des mots et des images calés dans leur fauteuil, les pieds enfoncés dans leurs chaussons, ils se délectent d'imaginaire dans l'attente de prendre un ticket pour l'aventure authentique et de se mesurer à un univers sans triche.
L'âme de l'aventurier sort du même creuset que celui des explorateurs et des pionniers de l'extrême. Intrépides anonymes, quidams de l'impossible poursuivent une quête, nul ne peut s'approprier ce mythe de l'aventurier car en chacun de nous sommeille cet instinct de vivre sa vie à fond, en harmonie, dans le plaisir, la douleur, la spiritualité ou tout simplement pour trouver ce sens qui donne à la vie une immense valeur.

Durée : 1 jours ( du 17/03/2001 au 17/03/2001)
Zone : Cambodge (+ de carnets de voyage) (Carnet sélectionné)[?]
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Cyclobarang
Carnet de voyage créé par Cyclobarang
Le 12 juin 2007

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PHNOM PENH- HO CHI MINH VILLE

Trajet de PHNOM PENH CAMBODGE à HOCHIMINH CITY VIETNAM en 17 heures à Cyclopousse en solo soit 260 kms sur une route défoncée.
record de l'inventeur du cyclopousse en 1939 battu enregistré et homologué par le Guiness book des records

Rond Point de Takmau
Sur la Route de Kompong Som(Sianoukhville)
Entrainement sur la Route N°6 vers OUDONG
Entre Takmau et le Vietnam
Voir le récit avec photos et commentaires

L'AVENEMENT DU CYCLOPOUSSE

La bicyclette moderne apparut entre 1839 et 1888, sa popularité imposa d'importantes améliorations au réseau routier dans de nombreuses parties du monde tout au long du XIXème siècle.
Dans de nombreux pays, elle est beaucoup plus utilisée que l'automobile. Son développement influença les autres moyens de transport, par exemple, le premier avion fut construit à partir de composants de bicyclette; ces différents éléments assemblés par de la colle à bicyclette.
C'est aussi grâce à cet esprit d'aventurier et à la passion de la bicyclette que le cyclo-pousse est né. L'avènement du cyclo-pousse remonte à 1939. On le vit apparaître cette année là à Phnom Penh pour la première fois.
Le créateur du véhicule Maurice Coupeau était un charentais sportif et tenace, il dût batailler ferme pour faire reconnaître son enfant par « l'état civil », en l'occurrence, les travaux publics.
Le Ministère des Colonies ne donna son agrément définitif pour l'utilisation de ce moyen de locomotion intrépide, qu'après avoir confié le nouvel engin à des vélocipédistes confirmés, Speicher et Le Grevès, héros du Tour de France.
Des essais eurent lieu à Paris, dans les larges allées du Bois de Boulogne. Finalement, les champions félicitèrent l'ingénieux charentais. Il baptisa le prototype au pineau, comme il se le devait. La capitale du Cambodge enfin donna droit de cité à l'irremplaçable cyclopousse.
Bientôt, Maurice Coupeau partit à la conquête de Saïgon. Il s'en fut en cyclo-pousse, piloté par deux coolies se relayant. Il mit dix sept heures et vingt trois minutes pour abattre les deux cent cinquante kilomètres qui séparent les deux capitales.
Son arrivée fut des plus spectaculaires, au beau milieu d'une course cycliste. Il fallut cependant plus de dix ans au cyclo pour éliminer son antique rival « le pousse-pousse» ; en 1952, on comptait 6500 cyclos-pousse à Saïgon. Depuis lors, l'efficacité du cyclo ne s'est jamais démentie.
A Phnom Penh, il est un instrument indispensable de la vie quotidienne et sert positivement à tout: transport de poulets, de cochons, de sacs de riz, de charbon, de caisses, de jarres d'eau, de motos, d'enfants, etc...La résistance du cyclo et celle de son pilote semblent sans limite.
A Saïgon, il en a été vu un qui transportait une carrosserie de voiture...Le cyclo est également le moyen le plus sympathique de découvrir la capitale cambodgienne, en particulier le soir, quand la circulation de la journée n'est plus qu'un souvenir et que l'on glisse sans bruit sur l'asphalte des quelques rues en état; c'est même encore meilleur après une grosse pluie, quand toute la poussière a été collée au sol.
Quel que soit la charge ou le nombre de passagers, le cyclo reste sans aucune contestation, le moyen de transport le moins onéreux et le plus écologique pour circuler à Phnom Penh.
L'esprit de l'aventure m'envahit de jour en jour, je suis habité par cette envie perpétuelle d'aller plus loin, de me découvrir, de vivre la vie à 100%, je suis en fusion, transcendé, je veux agir c'est mieux que rêver et comme disait mon Maître de Karaté:
« Mille mots ne valent pas l'action»
Pour ces raisons, je me suis lancé corps et âme avec la petite reine dans un premier temps et ensuite avec son frère hybride « le cyelo-pousse » sur ce chemin de croix.
Là, n'est pas ma seule motivation, je veux par ces défis, apporter mon aide et mon soutien au Centre des cyelos, et par mes efforts tirer un coup de chapeau à ces pauvres, humbles et glorieux cyclos.
Aller sur les traces de Maurice Coupeau, relier les Terrasses Royales d'Angkor Thom au Palais Royal de Phnom Penh ou prendre plaisir à me balader dans la ville, ne représentent que quelques moments de ma vie mais non une vie de conducteur de cyclo. .

L'Avénement du Cyclo pousse
Plus qu'un engin
Halte pour problème mécanique
Un métier à la force du jarret
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PERCHE SUR MON CYCLOPOUSSE

Il ya bien longtemps avant mon arrivée au Cambodge, je rêvais d'acquérir un cyclo-pousse, j'avais réfléchi à un moyen de locomotion mécanique proche de la bicyclette, qui me permettrait de transporter un minimum de matériel, l'expérience en vélo tout terrain d'un Raid extrême à Djibouti m'a appris combien il est vital d'avoir tout à portée de main.
L'adoption du cyclo-pousse comme moyen de transport favori n'a pas été sans peine, bien au contraire, et dès mon arrivée à Phnom Penh, ma première démarche a été de rechercher un engin. Je me promenais à motocyclette boulevard Monivong avec ma fille Bélinda quand elle me désigna un cyclo sur un trottoir. .
Son propriétaire était assoupi dans la chaise de transport, je m'empressais de le réveiller. Ce cyclo était magnifique en comparaison de tous ceux que nous avions déjà vus auparavant.
Nous nous décidions sans attendre à marchander le prix tout en inspectant la mécanique, aidés d'un badaud qui parlait l'anglais et semblait intéressé à nous servir d'interprète pour quelques riels.
Nous avons marchandé comme des chiffonniers et nous avons réussi à nous entendre sur le prix de la transaction 50 usd cadenas et clefs compris. Le conducteur du cyclo n'était autre qu'un pauvre paysan venu tenter sa chance en ville, usé par la vie citadine, des kilomètres à transporter vivres, clients et le tout venant pour un misérable salaire, il vendait sa machine pour rejoindre sa campagne.
Le rêve de devenir riche s'est vite envolé, il a préféré assurer sa subsistance à la campagne et vivre avec sa famille, c'est en définitive ce qui l'a décidé à vendre si vite son gagne pain à trois roues.
J'étais heureux, je venais enfin de réaliser un rêve, je me voyais au milieu de cette circulation typique d'Asie du sud-est, essayant de me frayer un chemin pour atteindre la campagne.
Maintenant, j'ai un besoin vital de m'évader loin de la ville bruyante, polluée, agressive par moment. J'ai apporté quelques modifications à mon engin, changement de selle, rajout de pédales avec cales pieds, emplacement du frein manuel entre mes jambes et non derrière la selle comme la majorité des cyclos de la capitale.
J'ai fait graisser tous les moyeux et roulements, changer les vieilles lattes du repose-pieds par du bois rouge exotique, les tubes qui entourent la chaise de transport par des tubulures chromées, ce qui donne plus de cachet à ce vieil engin.
J'ai peint le cyclo aux couleurs de notre drapeau, fier de savoir que cette invention est française et je l'ai orné de cuivres qui représentent le Bayon, Hanuman et des Apsaras pour ne pas être en reste avec la culture khmère et conjurer de fait le mauvais sort.
Pendant les six premiers mois de mon séjour, j'ai pu aiguiser ma condition avec mon fidèle compagnon, mon VTT de marque Peugeot energy qui a souffert comme moi lors de notre périple à Djibouti dans la corne de l'Afrique.
J'ai fait de très belles sorties vers le Kirirom, magnifique montagne couverte de pins, le Bokor, ancienne station balnéaire coloniale, des virées sur les bords du Mékong et ceux du Tonlé Sap, des endroits magiques où l'on se réconcilie avec la nature, d'une beauté à vous couper les jambes à sortir de Phnom Penh, des moments inoubliables plein d'exotisme et de charme.
J'ai avalé des kilomètres sur la toile qui s'étend autour de la capitale, j'ai fait quelques chutes mais rien n'a enlevé cette .envie qui me prend au ventre de quitter la ville pour aller chercher la bonne humeur, les rires, les sourires, la chaleur des cambodgiens sur les routes de campagne.
Une autre dimension où tous mes efforts sont récompensés, peu m'importe de souffrir de la poussière, des courbatures, des crampes et autres désagréments liés au soleil implacable sur ma tête, peu importe, ce qui compte c'est d'être en osmose avec mon environnement, de m'intégrer au pays pour m'y sentir bien, d'être en harmonie avec moimême et les cambodgiens en plongeant dans la vie locale.
Du haut de ma monture délaissant mon Vtt pour mon cyclo fin prêt, je sillonne dorénavant tous les chemins et toutes les routes du Royaume. Je suis heureux d'apporter de la joie aux khmers, ils me la rendent bien.
Sur mon passage, les yeux s'écarquillent, les visages s'illuminent, l'étonnement laisse place à l'admiration, les exclamations animent mon passage, « des hellos, des sok sobaï (çà va), des signes de main amicaux qui me donnent encore plus de conviction et de force pour aller encore plus loin.
Après mettre documenté sur le trajet Phnom Penh-Saïgon effectué par l'inventeur du cyclo pousse en 1936, c'est devenu pour moi une véritable obsession que d'arriver au même challenge à la différence importante que ce défi, je serais seul à le relever, seul à rouler pendant 260 kms.
y croire c'est bien mais se donner les moyens c'est mieux, avoir une mécanique éprouvée, vérifiée et connue de mes muscles mais surtout me tester par un entraînement assidu. Ma condition physique est parfaite mais les paramètres sont complètement différents d'un raid en vélo ou de toute épreuve d'endurance.
Le cyclo demande une certaine résistance que l'on acquiert au fil des mois passés sur la selle, position et maniement différents, poids de l'engin aux environs de 70 kgs qui ne permettent pas une vitesse importante sauf en descente, très rare au Cambodge.
Dans tous les cas, j'ai très peu dépassé les 30 kms/h, j'ai eu des douleurs lombaires, aux genoux et aux cuisses jusqu'au moment où tous les réglages ont été terminés, je peux dire maintenant, je suis aussi bien réglé et huilé que ma machine.
Je crois qu'après l'étonnement que suscite auprès des cambodgiens un « Barang » (français) perché sur un cyclo, prend place un certain respect.

Perché sur mon cyclopousse quai sisowath
Palais royal face à L'Assemblée Nationale
Perché sur mon cyclo
Après Pochentong la campagne
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LA CONFRERIE DES CONDUCTEURS DE CYCLO POUSSSE

Il ne faut pas oublier que le cyclo est l'outil du pauvre, et à ce titre il représente la classe sociale la plus basse de la société khmère, c'est l'un des premiers emplois que peut espérer un paysan pour quelques riels. Il loue d'abord une machine, ensuite il peut espérer en acheter une et la rentabiliser.
Les trottoirs donnent une image réaliste de cette vie de nomades, tantôt les conducteurs de cyclo vivent dans leur engin, s'en servent pour dormir, manger, s'abriter, tantôt ils l'utilisent comme une brouette, taxi ou benne pour transporter tout ce qui pourrait leur procurer quelque subsistance.
Je suis fier d'eux, ils ne se plaignent jamais, durs au mal, ils sont néanmoins pour la plupart d'une gentillesse débordante, le sourire toujours en signe d'accueil et toujours prêt à vous rendre service.
Chaque coup de pédale donné, chaque kilomètre avalé, je le dédie à leur courage, à leur volonté, à leur humilité, j'aimerais que leur labeur soit reconnu à sa juste valeur. Pas de couverture sociale, des heures de travail à n'en plus finir, je les classe dans les lais~és-pourcompte de notre société, esclaves des temps modernes tordus comme de vulgaires chiffons mouillés afin de récupérer jusqu'à leur dernière goutte de sueur.
Ils ont toujours fière allure, la casquette ou le chapeau bien vissé sur leur tête. Ils présentent souvent une silhouette en parfaite harmonie avec les heures passées à transporter les marchandises, les clients exigeants de la capitale. Agés ou à peine sortis de l'adolescence, ils me paraissent tous beaux, un certain charme émane de ces corps sculptés en mouvement.
Je les admire, ils permettent à l'économie de fructifier, leur labeur injustement payé contribue à l'enrichissement sur les marchés des vendeurs et des commerçants. Quel artisan, quel marchand n'a pas fait appel à un cyclo ? Ils sont indispensables dans ce pays qui sort peu à peu de son histoire tragique et du marasme économique dans lequel il était plongé.
Dans le monde des cyclos, beaucoup de conducteurs font simplement ce travail précaire pour passer du statut de che-rcheur d'emploi, à celui de résident temporaire de la cité et échapper à la dureté de la vie agricole.
Il faut admettre que conduire un de ces drôles de tricycles à cabine est un travail physique peu rémunérateur au regard des efforts fournis, c'est pourquoi, peu de gens le font toute leur vie, mais il n'est pas rare au Cambodge comme au Vietnam d'ailleurs de rencontrer des conducteurs sexagénaires et octogénaires.
Excepté pendant la malheureuse période « khmers rouges» certains arrivent à en vivre depuis les années 50 et ne savent pas faire un autre chose, d'ailleurs ils ne voudraient pas faire un autre métier.
Ils disent que les journées sont souvent les même, elles commencent toutes très tôt et finissent très tard et si rouler de nuit se perd, certains n'hésitent pas à faire comme au bon vieux temps.
Les plus anciens en parlent encore, c'était l'époque où les gens traînaient la nuit sur les quais, les cyelos étaient équipés de lampes à pétrole, Phnom Penh rayonnait sur le sud-est asiatique, sa réputation dépassait les frontières du Cambodge et de l'Indochine.
Rouler en cyclo dans Phnom Penh est une façon pour moi de valoriser le travail de ces hommes, d'attirer l'attention des gens sur ce mode de transport non dépourvu d'intérêt écologique, pratique et économique, d'apporter aux conducteurs de cyclo une certaine reconnaissance sociale et de vivre un peu leurs douleurs quotidiennes.
Je sais maintenant ce que veut dire piloter un cyclo pousse, j'ai un très grand respect pour ces travailleurs. La différence est d'importance, je tiens à le souligner, j'utilise le cyclo comme un loisir alors que pour eux c'est leur gagne-pain, néanmoins je peux m'avancer à dire que je partage quelque chose de très fort avec cette confrérie.

FIER D'ETRE CONDUCTEUR DE CYCLO POUSSE
Les conducteurs de  cyclopousse de Phnom Penh
Human rights
Cyclopousse de Phnom Penh
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A PHNOM PENH EN CYCLOPOUSSE

Dans Phnom Penh, c'est une ambiance continue, j'aime y rouler le matin de bonne heure, à la fraîche lorsque la douceur de la nuit s'estompe et que ses rues commencent à s'animer. J'enfourche mon cyclo pour aller humer l'air du quai Sisowath et regarder la communauté chinoise faire son taï chi quotidien.
C'est aussi bon à ce moment de la journée qu'en fin d'après midi, si rouler sur les grands axes est agréable, il n'en demeure pas moins que j'aime emprunter les rues adjacentes même si celles-ci sont très souvent dans un état déplorable comme certaines autour de l'hôtel Le Royal, de l'avenue de France, du Quai Sisowath ou près de la poste.
Une légende raconte que la ville fut fondée par une certaine Dame Penh après qu'elle eu fait la découverte miraculeuse de statuettes sacrées dans un tronc d'arbre flottant sur le fleuve. La colline de Dame Penh est devenue par la suite la nouvelle capitale de l'Empire khmer.
A l'époque coloniale, elle était considérée comme la plus belle Ville de la péninsule indochinoise, grâce à ses pagodes (pagode d'argent), son palais royal, ses belles rues larges et ombragées, ses berges des fleuves Mékong et Tonlé Sap, ses jolies villas, grandes spacieuses, verdoyantes où il régnait un charme particulier, une sérénité et une certaine quiétude. La ville a gardé de cette période des avenues larges et aérées ainsi que sa division en quartiers résidentiels(français au Nord, Khmers au Sud du palais royal et quartiers commerciaux chinois au centre ville.
Phnom Penh est magnifiquement située au confluent de deux fleuves qui forment quatre bras appelés les quatre faces (chaktomuk) rappelant les quatre visages du Bodhisattva d'Angkor Thom « première capitale de l'Empire Khmer» Ville-jardin pleine de charme, Phnom Penh la frénétique est marquée par plusieurs styles d'architecture après sa période coloniale.
Jusqu'à la décolonisation, l'influence du mouvement moderne de l'école française de Hanoï se fait sentir et un des plus étonnants monuments construit à cette époque vers1937 demeure le Psar Thmey marché central, véritable vaisseau de style art déco, lieu de rendez-vous des cyclos mais aussi des touristes en quête de bonnes affaires.
Marché animé et coloré, on ne peut pas le manquer, il reste pour moi un passage obligé à chacune de mes sorties, j'aime en faire le tour, il me donne la température de l'ambiance qui règne dans la ville et surtout j'aime y passer pour dire un petit bonjour à mes amis les cyclos.
La troisième période architecturale de la ville se situe lorsque le Prince Sihanouk affirma l'indépendance du pays, selon une synthèse des différentes architectures khmères et occidentales: pilotis, claustras ajourées, patios, auvents, loggias et balcons sont très prônés par les constructeu rs.
Depuis peu les maisons individuelles tendent vers le genre « Beverly hills » villas surdimensionnées à plusieurs étages, grandes portes en bois sculptées, portails aux ferronneries surchargées, chromage des rampes de balcons et d'escaliers, colonnades, miroiteries et climatisation à outrance qui donnent un air de Thaïlande, caprice de la nouvelle bourgeoisie phnompennoise.
La ville reste néanmoins bien structurée malgré son étendue et ses grands axes deviennent un plaisir pour y circuler en cyclo. Lorsque j'ai peu de temps à consacrer à mon entraînement je fais un parcours de 10 kms à travers la ville, qui me permet de rentrer rapidement en cas d'urgence pour mon travail, en empruntant les principaux boulevards de la capitale.
Mon point de départ est toujours le même ainsi que mon point d'arrivée, c'est à dire le boulevard Monivong sur sa partie Nord, petit coin de France avec l'Ambassade, l'hôpital Calmette, l'institut du cœur, l'institut Pasteur, la faculté de médecine et de pharmacie.
Nous arrivons ensuite dans le secteur de la gare ferroviaire avant d'atteindre la partie où l'on compte un bon nombre de restaurants et hôtels chinois, vietnamiens, aux enseignes et lumières dignes de la ville de Hongkong ou de China Town.
Si je pars vers le sud, je vais souvent jusqu'au bout du boulevard Monivong et je prend la direction de Takmau, la route est super bonne, l'implantation de nombreuses usines de confection apporte lors des relèves des ouvriers et des ouvrières plein de vie et d'animation sur mon passage. J'aime rejoindre ce petit coin de campagne aux portes de la ville surtout après avoir passé le pont où je ne manque pas de jeter un regard sur les embarcations de pêcheurs amarrées aux abords.
Après ce passage obligé, je prends la direction de la frontière vietnamienne en traversant la province de Kandal ou bien je vais vers la province de Takeo jusqu'au Tonlé Bati. Je roule en général quelques heures pour revenir à hauteur du pont vietnamien qui dessert la route nationale N°l vers Ho Chi Minh ville puis je me lance sur le boulevard Norodom plus à l'ouest près du monument de l'Indépendance, c'est un boulevard bordé de belles villas où l'on peut voir en retrait des ONG, des ministères et des sociétés qui ont pignon sur rue.
J'emprunte ensuite le boulevard Sihanouk en passant devant le Lucky market très fréquenté par les occidentaux et la bourgeoisie phnompennoise. Je rejoins ensuite le boulevard Sothearos pour passer devant le palais royal, la plupart du temps, je préfère suivre le Tonlé Sap et prendre le quai Sisowath devant les jardins de Hun Sen et de l'Hôtel Cambodiana, véritable promenade des anglais, le long du fleuve avec sa multitude de restaurants, cafés et bars animés en soirée, il y en a pour tous les goûts, un lieu de rendez-vous qui se prête aux rencontres.
Après cette première partie qui m'emmène près du rond point où se trouve le siège du parti royaliste « Funcinpec » le vieux stade et l'ambassade de France, je me dirige vers la rue des petites fleurs, haut lieu de la prostitution de la ville où avant les travaux de réfection de la route circulaire, on pouvait avoir un aperçu réaliste du fléau de cette misère qui touche les bidonvilles.
J'arrive ensuite sur le quartier de Tuol Kork près de la rue N°592, de véritables châteaux s'y construisent contraste effarant après la pauvreté que j'ai vu Rue des petites fleurs, je me pose des questions que tout le monde se pose mais personne ne veut en parler. D'où vient cet argent qui fait tant défaut à la majorité de la population?
Je continue ma route écoeuré vers le Boulevard Pochentong celui qui mène à l'aéroport international puis empruntant le boulevard Kampuchéa Krom je rejoins le marché central enfin j'atteint le jardin du Wat Phnom avec sa pendule, sa pagode(lieu fondateur de Phnom Penh) et son célèbre éléphant Sambo spécialisé dans les promenades pour touristes.
Sur l'avenue de France, je passe devant l'Hôtel "Sheraton, l'hôpital militaire et je parviens près de l'Hôtel Bayon situé à quelques centaines de mètres que toutes les familles françaises qui viennent au Cambodge pour une adoption connaissent.
Le tour me prend une bonne heure environ, il m'est arrivé de le faire quatre ou cinq fois, j'y ajoute parfois des variantes pour le rendre moins monotone. Je roule de cette façon quand il m'est impossible de quitter la ville, les routes deviennent de plus en plus carrossables et depuis mon arrivée, je suis heureux de constater les progrès réalisés sur les boulevards Monivong, Pochentong, Norodom, Charles de Gaulle, autour du Wat Phnom et bien d'autres rues. Ces travaux de réfection terminés Phnom Penh devrait retrouver son faste d'antan et le rang qui est le sien.
J'ai mes endroits et mes supporters, un passage près du grand vaisseau (marché central) est quasi une obligation, j'aime me fondre dans ce brouhaha, cette ambiance typique et hétéroclite où les couleurs et les genres se marient sans contraste choquant.
Commerçants, ménagères, cyclos, motocyclettes convergent vers ce centre d'affaires, chacun à sa manière s'attèle à y donner de la vie, non loin de là, les voitures taxis, les pick-up et les minibus font le plein de passagers, leurs toits se chargent de colis en tout genre: sacs de riz, ananas, noix de coco, poulets vivants, canards, porcs ficelés dans des nacelles d'osier, télévisions, cartons de cigarettes, motos, vélos enfin villageois et paysans qui ramènent des marchandises de toute origine, tout cela dans un tohu bohu bien orchestré par la police et les vigiles.
Traverser la ville en cyelo reste toujours une découverte de chaque instant, j'en prend plain les yeux, petit à petit Phnom Penh se remet des années de guerre et d'incurie, les choses ont l'air de vouloir changer, la reconstruction a repris, des bâtiments neufs voient le jour et les anciens sont rénovés ou démolis pour laisser place à de nouveaux projets immobiliers.
Impossible e concevoir Phnom Penh sans cyclos, ce serait imaginer Paris sans bateaux mouches, Londres sans bus impériaux, la capitale reste un fief pour ce moyen de transport vert, traditionnel, la ville d'Ho Chi Minh connaît aussi cette chance mais pour combien de temps? des mesures restrictives ont été prises et les dernières usines de Cholon fermées. .
Si les routes ont été par le passé dangereuses, elles ne le sont pratiquement plus, je m'en réjouis également, les Cambodgiens peuvent aujourd'hui circuler librement même si les transports doivent lâcher des « batchichs » aux forces de l'ordre aux entrées et aux sorties de la ville, pratique qui devrait un jour disparaître pour le bien de tous et si l'on veut véritablement croire à un état de droit.

Aux abords du Mekong
Le Psar Thmei
Entre Palais Royal et Tonle Sap
Quai Sisowath
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ESCLAVES DES TEMPS MODERNES:UN METIER?

La population principale qui vit du cyclo est à dominante masculine mais j'ai pu apercevoir une fois ou deux une cambodgienne qui en conduisait un avec autant d'habileté que ses confrères.
Quand on sait l'état physique que demande la conduite d'un cyclo, la chose paraît étonnante même si l'on sait que la femme khmère a beaucoup de tempérament.
La machine pèse à vide de 60 à 70 kgs environ et lorsque par malchance un cyelo doit s'arrêter aux feux tricolores, reprendre son élan nécessite un effort quasi surhumain.
Si ce métier à parfois était interdit ou réglementé, jugé dégradant ou peu rémunérateur, il reste à la demande générale des usagers et des conducteurs, un agréable moyen de locomotion incontournable pour assurer une tranche de liberté.
Si les cyclos sont matinaux, il n'est pas rare de les voir s'arrêter pour se restaurer ou faire une sieste dans des lieux bien connus de la corporation: Rue N°63, quai Sisowath, marché central, place de la poste, près du musée national, autour du Wat Phnom ou des nombreux marchés « Olympique, Russe et tous les autres, c'est l'occasion pour eux de partager un verre avec des amis, se reposer à l'ombre d'un mur ou d'un arbre, allongé tant bien que mal dans leur monture de métal.
Devant les marchés, les restaurants, les hôtels, les hôpitaux, chaque cyclo a son lieu de travail habituel et à défaut il saura se placer à un endroit stratégique de la capitale, chacun travaille sur son territoire de prédilection et il arrive parfois que certaine place se monnaie.
Les cyclos travaillent tôt le matin, ménagères les bras remplies de courses, enfants désireux de se rendre à l'école à petit prix, marchandises à livrer sont le quotidien, si ce n'est par chance un touriste qui les hèle; après quelques discussions sur le tarif, il aura droit à un moment privilégié pour visiter la ville, bercé par le cahotement du cyclo, sans contrainte et en toute sécurité, à l'inverse des motos taxis, profitant de la fraîcheur occasionnée par le déplacement ou l'ombre de la capote.
Je croise souvent des cyclos qui transportent des marchandises de toute nature, dernièrement j'en ai vu un qui se déplaçait avec une table basse cambodgienne immense, au moins deux mètres sur deux mètres; celle-ci était installée à l'avant de l'engin et lui conférait un équilibre incroyable, je l'ai dépassé très rapidement pour aller me poster plus loin au bord du bd Norodom afin de photographier ce transport me paraissant totalement inédit.
Depuis deux ans, je me suis lancé dans ce mode de locomotion, c'est presque devenu un rituel quasi permanent de saluer mes amis cyelos sur mon passage, la majorité me connaît maintenant et même si je roule la tête dans la barre de diection pour manger les kilomètres et plus vite qu'eux en général.
Je ne manque pas de leur faire un signe de la tête ou de la main lorsque nous nous croisons, çà leur suffit pour qu'ils comprennent toute ma sympathie et la force qui nous unie, je souligne qu'eux glanent au travers des rues leur travail alors que je cours derrière le temps et les kilomètres pour mon plaisir personnel, ce qui ne m'empêche pas de m'arrêter pour discuter mécanique avec un cyelo ou bien de sa vie.
Ce qui m'inquiète c'est que le cyclo est en train de se faire supplanter par les motos taxis, c'est dommage car c'est une part du patrimoine du Cambodge qui risque de disparaître si personne ne prend conscience de la nécessité absolue de garder cet outil écologique, utile au tourisme grandissant au Royaume.
Je ne voudrais pas assister aux adieux de ce pan de liberté malmené par la rude concurrence des autres moyens de transport mais préservé dans cette étonnante ville grâce à la persévérance de quelques irréductibles amoureux du passé. Depuis 1992, le nombre de cyclos a chuté de 10 000 à 2500, plus de 1000 seraient encore immatriculés au service des transports de la municipalité, les autres quadrillent la ville dans l'illégalité.
Chaque jour cette couche vulnérable de la société citadine se livre à une course effrénée pour sa survie, itinérants et saisonniers le plus souvent, ils vivent parfois dans un isolement total que rien ne laisse transparaître quand ils vous sourient, leur dignité reste intacte qu'elles que soient les conditions de leur travail, que la ville soit sous une chaleur torride ou en proie à des pluies diluviennes.
La plupart des cyclos sont originaires des provinces voisines les plus pauvres de la capitale, les nouveaux venus osent se lancer dans cet emploi en passant d'abord par les loueurs de cyclos, véritables chancres pour leur gagne-pain avec l'espoir d'acquérir leur propre outil de travail.
Le métier est en perte de vitesse, sur la dernière décennie même si quelques soubresauts se font sentir depuis les dernières inondations et l'afflux de touristes. Ce moyen de locomotion est ancré dans le mode de vie, beaucoup de gens donnent encore leur préférence au cyclo en tant que véhicule vert et transporteur de marchandises.
Les cyclos qui roulent à vide sont monnaie courante, certains signes prometteurs se font sentir: création de compagnies de cyclos, reconversion en support publiciatire. Ce nouveau toilettage décoratif au blason de certaines sociétés est une nouvelle chance pour la corporation.
Etre cyclo ce n'est pas facile mais ils sont fiers de l'être, toujours dignes, ils pédalent sans oublier leur famille, là-bas en province.
Si la tendance est à l'amélioration du niveau de vie dans les provinces, ce qui engendre moins d'exode rural, il n'en demeure pas moins que la corporation attire toujours même si le métier est rude.
Leurs principaux ennemis:
Les voleurs qui anéantissent les efforts d'un dur labeur et le temps qui abîme leur santé, mais rien ne les découragent.
L'entraide est importante chez les cyclos et pour faire face aux difficultés à la nuit tombée, ils se concentrent et se rejoignent chez les loueurs ou dans des endroits bien éclairés, seulement 30% des cyclos sont propriétaires de leur engin et le reste passent obligatoirement par les loueurs, véritables sangsues, leurs maigres gains leur permettent une existence au jour le jour.

Esclaves des Temps modernes?
Un moyen de transport
Habile et rapide ce cyclo
Attente chevronnée au Psar Thmei
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SORTIE EN COULEURS PENDANT LA FÊTE DES EAUX

Après les dernières ondées le boulevard Monivong s'est recouvert d'une poussière rougeâtre qui s'infiltre partout, sous les portes, sur les façades et sur les arbres, elle imprègne les visages et les vêtements. L'artère principale de Phnom Penh où les véhicules slaloment entre les nids de poules devrait connaître d'ici peu une cure de jouvence.
Les vieilles demeures coloniales qui abritaient des squats, de vieux bâtiments publics, écoles, cinémas sont réhabilités, la ville est en effervescence.Les marchandises circulent à foison, j'ai pu constater depuis mon arrivée un renouveau, Phnom Penh revit, c'est certainement dû à une certaine stabilité politique même si celle-ci ne satisfait pas tout le monde. Les touristes reviennent en nombre.
J'ai déjà fait quelques longues sorties qui ont fait couler la sueur sur mon front, seul ou en transportant ma famille, j'ai endurci mon corps, mes muscles et mon mental. Je sais qu'un trajet de 100 kms en cyclo est l'équivalent du double en vélo, je peux réussir à me surpasser pour atteindre Saïgon, je dois souffrir à l'entraînement dans mon fort intérieur je me dis que je vais réussir.
La machine est quasiment prête, j'avais entrepris de faire alléger mon cyclo par un vieux vietnamien, ancien conducteur de cyclo, mais cette personne trop âgée et fatiguée, a dû renoncer à cette tâche.
En fait, ce n'est pas un mal, j'avais l'impression de tricher sur les origines de mon engin, il reste à renforcer quelques soudures litigieuses, faire les demandes administratives et je pourrais prendre la route du Vietnam, en attendant place à l'entraînement et aux belles sorties.
Parmi mes souvenirs sur cette préparation, j'aime me remémorer certaines sorties pleines de couleurs, en l'occurrence celle que j'ai réalisée pendant la fête des eaux, juste après les inondations du siècle. Comme souvent, lorsque je suis de repos, j'enfourche mon cyclo pour m'évader du bunker, boulevard Monivong.
J'aime me fondre dans le flot de circulation composé de toutes sortes d'engins, intégrer la vie locale, partir sur la route afin de voir la ville en effervescence, à la recherche des senteurs, du soleil et de la brise dès que j'atteins la périphérie de la ville aux environs de Preak leap sur la route de Kompong Cham.
Aujourd'hui je suis particulièrement gâté, nous sommes au mois de novembre, les eaux du Tonlé Sap sont le théâtre de courses d pirogues multicolores, elles me rappellent un peu l'euphorie rencontrée lors des joutes navales de Sète.
La fête des eaux commence à Phnom Penh, elle est célébrée le jour de la pleine lune de novembre, au mois du Kattik. Pendant ces jours de festivités, les Cambodgiens célèbrent l'adoration de la lune, la récolte du riz et le renversement du cours des eaux du Tonlé Sap, un des quatre bras du fleuve Mékong. Les trois jours de courses de pirogues en face du palais royal restent le principal rendez-vous de ces fêtes et de l'année.
En 1434, Phnom Penh s'appelait alors Chaktomuk (les quatre rivières)car les quatre bras du fleuve s'y rejoignent: le Tonlé Sap, venant du lac du même nom situé dans le Nord, par ce fleuve et en traversant son lac, on se rend en bateau sur le site des temples khmers dont le plus connu reste sans contexte Angkor. Ce fleuve se jette dans le Mékong qui se divise à nouveau en deux, le bas Mékong et le Tonlé Bassac.
Situé sur ce magnifique carrefour fluvial, à la jonction des quatre bras, poumon économique de la vallée du Mékong, la ville de Phnom Penh s'étend le long des rives qui commencent à être aménagées de promenades, berges, quais et nouveaux embarcadères comme à l'époque de sa splendeur.
Perché sur ma selle, je pars en direction du pont japonais, mon corps commence à peine à s'échauffer, la côte tire sur mes bras et sur mes jambes, tout doucement j'effectue l'ascension, la brise souffle du Tonlé Sap vers le Sud, c'est trop bon, la température oscille entre 30 et 33° en ce mois de novembre.
Je m'arrête au sommet du pont en prenant garde aux motos qui passent à ma droite et aux véhicules qui me doublent sur ma gauche, je jette un regard furtif sur le fleuve, j'aperçois des jacinthes d'eau dans les remous, des bateaux montent et descendent le courant
Plusieurs semaines avant le début des courses, les pirogues sont sorties des pagodes où elles sont conservées pendant l'année et mises à l'eau. A cette occasion, les statues de Bouddha sont nettoyées dans les lieux saints et des processions ont lieu à travers le pays. Les pirogues sont ensuite acheminées sur Phnom Penh, ce sont des barques longues et étroites, richement décorées de sculptures, dont l'extrémité se prolongent par une tête de serpent, le naga sacré.
Certains équipages ne comptent pas moins de 50 hommes assis les uns derrière les autres, dans des barques avoisinant parfois les 40 mètres de long. Parmi l'équipage on compte des joueurs de gongs et de tambourins, des hommes donnent le rythme aux rameurs, tout cela dans un brouhaha d'eau, de musique et de cris qui donnent à tous force et courage pour affronter les autres équipages.
Ce spectacle est certainement le plus haut en couleurs du pays. Ces trois jours de festivités rassemblent les Cambodgiens qui affluent de toutes les provinces vers la ville royale pour assister aux courses, au feu d'artifices, améliorer leur quotidien en se transformant pour certains en marchand ambulant ou pour d'autres simplement rendre visite à la famille pour honorer les serpents sacrés et les remercier pour leur protection.
Toutes sortes d'embarcations se croisent près des docks qui longent le Quai Sisowath, point de départ vers la Mer de Chine en passant par le delta du Mékong au Vietnam. Sur les eaux, à bord de maisons flottantes ou autour des maisons en bois construites sur pilotis, les gens vivent et font vivre la population cambodgienne, cette économie rurale reste le socle de l'économie du Cambodge.
Partout, que ce soit sur la presqu11e des Chams "CChrui Changvar) en face du palais royal, sur les bords du Mékong, au bord du grand lac où à l'intérieur des terres, la population tire les principales denrées des eaux et des terres limoneuses.
Les couleurs dominantes restent la terre sienne des eaux, le vert des rizières ou celui des palmiers. Ces couleurs sont en harmonie avec la peau des habitants, pour certains elle s'approche de l'ébène, pour d'autres elle s'apparente au café, certains métissages sino-khmers ou eurasiens donnent à certains des teintes plus claires.
J'ai croisé sur ma route des tas d'enfants, tous plus beaux les uns que les autres, je ne peux penser à cette vague démographique s'en m'interroger sur leur devenir. Quelle richesse mais aussi quelle tristesse si les choses n'évoluent pas dans le bon sens pour ce magnifique pays qui reste encore un lieu à découvrir, propice à l'aventure.
Si pour certains ce pays où a régné la terreur demeure une destination à risque, il reste néanmoins un pays où le sourire fait partie de l'accueil, premier signe d'hospitalité. Le Royaume Khmer est incroyablement fascinant malgré les plaies béantes du passé.
Comment ne pas tomber sous le charme de sa beauté et de ces gens aussi attachants? Le pays vous invite autant à la douceur qu'à la découverte, il entraîne des réactions passionnantes où se mêlent des sentiments écoeurement, d'amour, de solidarité ou simplement l'envie de se confronter à soi-même pour découvrir une terre imprégnée d'humanisme.

SORTIE EN COULEURS PENDANT LA FÊTE DES EAUX
Fête des eaux
Fête des eaux au Cambodge
Pirogues
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LE GRAND MEKONG-PAYS D'EAU

Etat de la péninsule indochinoise, le Cambodge partage ses frontières avec la Thaïlande, le Laos, le Vietnam et il est bordé par le Golfe de Thaïlande. Défini comme un « pays de plaine à encadrement montagneux », le Cambodge est avant tout un don du Mékong car c'est principalement une vaste plaine alluviale formée de l'accumulation des limons du fleuve.
Le Mékong est un fleuve parmi les dix plus long du monde avec ses 4200 kms et de loin le plus important d'Asie. On ne peut pas parler du Cambodge et encore moins de Phnom Penh sans faire référence à ce fleuve véritable garde manger pour le pays et indispensable voie de communication. II occupe d'ailleurs une position assez originale puisqu'il se partage entre six pays.
II prend sa source sur le plateau du Tibet dans la province chinoise du Yunnan où les populations montagnardes l'appellent Dza Chu « l'eau des rochers» plus au sud Lancang Jiang soit « La rivière turbulente », il passe ensuite par le Myanmar, le Laos, la Thaïlande où les Thaïs l'ont surnommé Mae kon « Mère des eaux» qui est en fait son origine étymologique, arrivé au Cambodge, les khmers l'appellent Tonlé Thom « Le grand fleuve» et enfin le Vietnam pour terminer son cours en Mer de Chine, les Vietnamiens l'ont baptisé Son Cuu long « Le Dragon à neuf têtes» tout un symbole.
Au XIXème siècle, lors de la mise en place des empires coloniaux, il est considéré comme un moyen de pénétration vers les riches marchés de la Chine Centrale.
L'idée pour la France est de rallier la vallée supérieure du Mékong au Cambodge et la Cochinchine pour concurrencer commercialement la Grande Bretagne installée en Birmanie.Remonter le fleuve devient alors une obsession et les voyages d'exploration s'enchaînent ainsi que les déceptions. Nos marins explorateurs ont dû rendre compte: « Le Mékong ne peut servir de voie fluviale et commerciale avec l'Empire du milieu, ni même de lien avec les possessions françaises en Indochine.»
La navigation sur le fleuve est entravée par de multiples chutes et rapides situés presque tout du long de son cours. Le Mékong est une barrière naturelle à laquelle les navigateurs se sont heurtés, il fait d'avantage office de fleuve frontière que de fleuve lien sur plus de 50% de son parcours. Le mythe s'est effondré et le fleuve un peu oublié.
Près d'un siècle plus tard, le Mékong devient un fleuve utile,
moteur du développement de la région sous l'égide de la Commission du Bassin du Mékong et de la Banque Asiatique du Développement, le fleuve région servirait de support à une grande région économique « Le Grand Mékong»
Cette région économique, prospère et unie serait composée cette fois-ci de tous les pays riverains du fleuve, projet largement ambitieux donnant place à une coopération grâce en l'occurrence à la modernisation des moyens de communication. Ces nouveaux liens modernes devraient garantir un nouvel élan économique pour chaque voisin
A l'intérieur du Grand Mékong, les peuples sont liés par une histoire commune, des liens culturels et linguistiques étroits selon les experts; cette double diversité ethnique et culturelle est l'une des forces du Cambodge, en effet ce pays est une région de très vieille culture humaine sur le sol de laquelle se sont rencontrées et affrontées les deux grandes civilisations de l'Asie: L'Indienne et la Chinoise.
Le Mékong est à la fois bénédiction et malheur. Pendant la saison des pluies, les eaux envahissent le quotidien, terribles inondations, spectacle désastreux de cultures noyées, maisons détruites qui apportent son lot de désolation et de réfugiés vers les quartiers des villes les moins touchées.
Les paysans entourent leurs plantations et leurs cahutes de murets, de sacs de sable ou de terre. Les sans abris deviennent légions et comme partout où le malheur s'abat, ce sont les enfants les principales victimes. Les orphelinats se remplissent, les appels à l'aide internationale se font pressants et les distributions de vivres se multiplient.
Après cette saison difficile, les eaux se retirent et les semis se parent de leur vert émeraude, la campagne est alors bouillonnante de vie. Je me plais à traverser en cyclo ces paysages, voir les gens s'activer dans les plantations de riz, leur faire un geste de la main de compassion avec leur dur labeur.
Pendant la saison des pluies, j'ai l'impression de n'être entouré que d'étendues d'eau, le Mékong dépose sa fertilité sur cette terre qu'il a détrempée. Il faudra attendre l'époque des moissons pour que ce manteau passe du bleu au vert puis du vert à l'ocre.
L'eau, c'est la vie particulièrement au Cambodge puisque la population est à dominante rurale. C'est l'élément indispensable mais abondant, les gens aiment y vivre au bord, ils construisent leur maison au plus près et irriguent avec leurs champs.
Terrain de jeux favori des enfants, ils s'y baignent et y jouent quasi quotidiennement. Parmi mes entraînements, nombreuses sont les fois où je me suis plu à suivre les courbes du Dragon, que ce soit sur la RNOl vers le Vietnam ou la RN06 vers le Nord, cela reste pour moi un paysage merveilleux où mes douleurs disparaissent devant la beauté de la nature et des habitants.
Ces eaux très poissonneuses nourrissent toute une population, un simple regard à l'arrivée des pêcheurs Chams ou Vietnamiens près des rives du Bassac, non loin de l'Hôtel « Le Cambodiana » donne un aperçu des pêches miraculeuses que l'on y fait. Les étals des marchés permettent un grand choix de variétés pour satisfaire les papilles de chacun.
Les fortes pluies et les crues ont causé la mort de nombreuses personnes pendant cette mousson de l'année 2000 ;
heureusement elle se termine; malgré tout ce ne sont pas moins de 3700 hectares de rizières qui ont été détruits, un déluge méconnu depuis longtemps. Cette forte montée des eaux du Mékong a fait reprendre conscience à la population que le fleuve donne la vie mais qu'il peut également donner la mort.
La vie est paisible à la campagne, il fait bon y vivre et si la majorité des Cambodgiens y vivent ce n'est pas du tout un hasard, presque tout y pousse, les gens sont en autosuffisance alimentaire quand Dame nature ne transforme pas les vallées en Pays d'eau.
Il est tout de même dommage de voir de grandes étendues encore en friche du côté de la RN01 entre Phnom Penh et Neak loeung, chose impossible chez le voisin vietnamien. C'est peut-être dû aux problèmes d'irrigation et de démographie.
Il arrive que sur ma route je sois incommodé par quelques odeurs fortes surtout en direction du Vietnam, lieu de prédilection de mes entraînements en préparation du raid Phnom Penh-Saïgon que je m'apprête à réaliser. Ces effluves émanent de tas de petits poissons entreposés sous les maisons de bois sur pilotis que femmes et enfants s'affairent à préparer; .
Après les avoir vidés et coupé leur tête, ils les disposent en brochettes sur des lattes de bambous et les déposent sur des grands fumoirs, une fois fumé, ils seront acheminés vers les marchés de la capitale ou celui de Neak Loeung, là où le franchissement du Mékong s'opère avec un bac et permet de continuer la route vers Ho Chi Minh Ville.
Pendant les crues, les gens ne se déplacent plus qu'en barque dans la région et sous chaque maison sur pilotis, on peut en apercevoir au moins une. Décembre, janvier et février sont les mois pendant lesquels l'activité du fumage est de loin. la plus importante, le reste de l'année sur la RN 01, on plante du riz, du maïs, des joncs qui permettront de fabriquer des nattes.

Pont vietnamien
Enfants du Mekong
Pays d'eau et rizières
Paysage au Cambodge
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LES ARTISANS SUR LES RIVAGES

D'autres activités peuvent être vues si on y prend garde, entre autre le tissage, celui-ci rudimentaire est exercé avec de vieux métiers à tisser fait de bric et de broc, cet artisanat mérite que l'on s'y intéresse car c'est vraiment un spectacle inédit de sons et de couleurs.
Des jeunes filles se tiennent toute la journée près de ces machines au bord de la route, abritées seulement par quelques tôles;
Quelques kilomètres avant Koki sur les bords du fleuve, chaque maison possède son propre métier à tisser. Le bruit et la poussière dû à des passages incessants d'engins motorisés n'altèrent en rien leur bonne humeur et le sourire qui illumine leur visage encore plein d'adolescence.
La couleur des tissus et leur composition restent leur secret, un clin d'œil aux amateurs d'exotisme et de pittoresque.
L'artisanat cambodgien connaît un essor de plus en plus grand, le tissage certes mais d'autres secteurs comme la vannerie, la céramique, la sculpture, l'orfèvrerie, le travail du rotin, de l'osier ou du jonc sont de véritables microéconomies. Les routes sont remplies de ces petits artisans qui font la richesse du pays.
Il existe de grandes régions de tissage et chacune a sa spécialité avec des motifs et des couleurs différentes. L'art du tissage est ancestral, les motifs traditionnels. Les jeunes filles sont éduquées et formées dès le plus jeune âge. Filer le coton, teindre les fils et préparer les couleurs naturelles se transmettent de mère à fille.
Je regarde ces femmes tendrent la chaîne, lancer d'une main assurée la navette de bambou puis tasser les fils à l'aide d'une règle en bois dur. La soie khmère est réputée dans le sud-est asiatique pour sa grande variété de motifs.
Les rivages sont éclairés d'une lumière insensée, les couleurs Représentent la puissance de celle-ci, j'aurai bien du mal à retraduire de manière picturale cette palette et les émotions éprouvées. .
Paysage paradisiaque, vert émeraude, bleu transparent, lumière féerique se marient avec ces sourires, ces corps, sans aucune contradiction. Seul dénote dans ce fabuleux paysage, les plastiques, les ordures et les déchets entreposés çà et là, véritable outrage à l'environnement.
Cette préparation de la soie est longue et difficile, les journées sont harassantes et les salaires très bas, m'arrêter juste quelques instants pour admirer la magie du métier à tisser ou bien m'informer simplement sur les conditions de vie de ces gens, me permet de récupérer en échangeant quelques mots en khmer.
Quelques boutiques de Phnom Penh et de Siem Reap offrent une sélection intéressante de l'artisanat cambodgien, pour être sûr de trouver une variété de ces objets le marché russe ou le vieux marché près des temples restent les lieux privilégiés où les touristes aiment flâner à la recherche des pièces originales et marchander en espérant décrocher la bonne affaire.
Lorsque j'emprunte le pont japonais, je prends du plaisir à m'arrêter quelques instants voir les poterie, certaines sont destinées au culte, d'autres ressemblent à des amphores, plusieurs ont des formes zoomorphiques, bols, bougeoirs, pieds de lampes, vases, assiettes grandes et petites, elles sont diverses aux couleurs terre sienne, ocre ou brique.
Les enfants travaillent la glaise pendant des heures sous leurs pieds au bord de la route, vêtus de guenilles et ruisselants de sueur, le visage creusé par la faim et la fatigue, ainsi travaillée la matière sera ensuite pétrie de main de maître par les potiers. La principale région de production reste très certainement Kampong Cham.
Comment ne pas parler de cette richesse artisanale que l'on découvre au bord des routes, sur les étals des boutiques ou des marchés de la capitale et des provinces, ce serait insulter ce peuple de travailleurs quoi que certains en disent.
Sur la presqu11e de Changvar, je ne compte pas le nombre de fois où je me suis arrêté pour regarder les jeunes orfèvres khmers ou chams ciseler des pièces traditionnelles, des boîtes avec des formes végétales ou animales; plateaux, carafes, couverts, objets de toutes sortes. Je ne m'attarderais pas à parler du travail de l'or et de l'argent en bijouterie, véritable apostolat pour les sino-khmers installés sur les marchés.
Les cambodgiens s'ingénient à créer des objets utilitaires et artistiques, échanger, vendre et exporter pour subvenir à leurs besoins, ce sont des artistes à part entière. Ce sont à la fois une identité culturelle et un facteur de développement qui se mettent en place après les nombreux événements malheureux que le pays a dû traverser au cours des derniers siècles.
La France participe au redressement de la sériciculture cambodgienne et j'en suis fier. La soie cambodgienne, à vrai dire n'a jamais cessé d'exister, même sous le règne des khmers rouges, toutes ces activités étaient devenues insignifiantes et en sommeil, aujourd'hui l'artisanat est en effervescence et principalement les soieries du Cambodge.
Sarong à gros carreaux pour les hommes et petits carreaux pour les femmes, phamuong pour les jupes, chorébab à motif floral, ibeuk, anlounh, hol, tissus de grandes occasions ou portés à la maison, la consommation de tissu est impressionnante et apporte un complément non négligeable aux paysans.
Cette filière traditionnelle de la soie avec un partenaire privilégié qui est la France a redémarré créant une véritable insertion pour des jeunes villageois même si cette activité de développement rural reste une activité familiale, elle reste un complément à l'activité principale qui est le riz. Si certains parlent de développer les régions du Mondolkiri et du Rattanakiri, il faut savoir que la sériciculture industrielle pourrait trouver sa place sur ces hauteurs.
J'ai d'ores et déjà adopté le krama, grand foulard traditionnel rectangulaire en coton, à larges carreaux bleu et blanc lorsque je me déplace en cyclo. Je le porte autour de mon cou ou sous ma casquette comme beaucoup de paysans. Il est utile pour me protéger la tête du soleil de plomb qui sévit en journée quand je m'amuse à rouler quelques heures, avec lui je sèche la sueur qui ruissèle sur mon visage.
Il est devenu l'élément indispensable entre autre avec mon camelback (sac à dos avec gourde souple) De plus en plus de krama sont en soie, les touristes l'arborent autour du cou, si en coton il est peu coûteux, son prix en soie n'est pas le même.
Les tissus font fureur dans les événements familiaux surtout les mariages, tout le monde se met sur son trente et un. Les couleurs donnent un éclat de somptuosité aux cérémonies et aux fêtes, même si parfois cela peut contraster avec la vie réelle des familles. Les cambodgiens attachent beaucoup d'importance à leur tenue, ils aiment bien présenter et n'hésitent pas à se parer des plus beaux àtours.

Chargement d'un cyclo
Le Krama du cyclobarang
Des vendeuses d'agrumes
Koki Beach
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L'AUTHENTICITE DU CÔTE CAMPAGNE

La première année où je suis arrivé au Cambodge, mes premières sorties m'ont emmené vers le sud du pays, j'y suis retourné en cyclo à plusieurs reprises, nostalgique de ces routes qui mènent à Kampot, Kep ou Kompong Som(Sianhoukville).
La région de Takeo, territoire des cités pré-angkoriennes (VI-VIIème Siècle), dont les temples se dressent sur le Phnom au milieu des rizières parsemées de palmiers à sucre, reste une de mes régions préférées. Bien que très cahoteuses, ces routes procurent un plaisir de tous les instants.
Sur la chaussée, on peut croiser différentes époques, différents types de gens: les écoliers et les écolières vêtus de blanc et de bleu se rendent à l'école ou qui en reviennent sur leur bicyclette, les petites remorques colorées tirées par de vieilles motocyclettes coréennes sont remplies de villageois ou de paysans, près des maisons en bois sur pilotis, les gamins se baignent dans des mares, tandis que les buffles d'eau aiment à se vautrer dans la boue, des poissons sèchent au soleil, certaines jeunes filles font la lessive ou préparent des beignets de bananes flambées.
Les poules et leurs poussins viennent souvent chatouiller la route mais ils ne s'y aventurent pas, parfois une vache se promène sur l'asphalte et cause un arrêt du trafic. A la saison des pluies, les étendues d'eau sont peuplées d'oiseaux puis viennent les fleurs de lotus.
Les cahutes le long des routes vendent des boissons, des noix de coco et permettent de se restaurer. Mille et un artisans s'installent sur les bords, on est sûr de toujours rentrer à bon port même si un incident mécanique arrive. La vie au Cambodge, c'est vraiment un tableau inoubliable toujours plein de beauté, de gaieté mais aussi de surprise. Pauvres occidentaux cloîtrés dans la capitale, que de richesses, que de plaisirs ou de souvenirs perdus!
La route N°03 plonge au sud vers Kampot au pied de la chaîne des éléphants, à l'ouest de cette bourgade provinciale et de son style néo-colonial au cœur d'un parc où l'on chassait jadis le tigre et le chevreuil. La région, aujourd'hui déminée, cache au fond de grottes des sanctuaires de l'époque Funan et s'ouvre doucement au tourisme.
A quelques mille mètres d'altitude, surplombant la baie et le Golfe de Thaïlande, le plateau du Bokor reste un lieu mythique, ancien fief des khmers rouges jusqu'en 1998, où se dressent les vestiges d'un âge d'or, celui de la station thermale la plus renommée de toute l'Indochine avec son casino « Le Bokor Palace» et son village en ruines.
Je m'y suis rendu en vélo tout terrain avec deux expatriés français au départ de Phnom Penh en juin 2000, nous avons fait le trajet de 200 kms en 10 heures, un souvenir inoubliable, un endroit verdoyant exceptionnel à protéger et à découvrir. Beaucoup d'efforts récompensés par un décor naturel digne de la forêt tropicale, des arbres majestueux plantent leurs racines sur les rochers, des cascades d'eau se frayent un chemin à travers la végétation, le silence règne, simplement interrompu par le chant de quelques insectes et oiseaux ou parfois le cri d'animaux invisibles.
Parmi les lieus dont j'aime à me souvenir lors de mes sorties en cyclo pousse, Oudong reste un de mes sites préférés. La route qui y mène suit le Tonlé Sap et les villages de pêcheurs se succèdent, à commencer par ceux de la communauté Chams de Russey kéo. Tout le long de cette nationale, on distingue sur la droite le Phnom qui domine la vallée et la silhouette de ses temples.
Les difficultés physiques et celles du terrain sont vite oubliées devant la splendeur de la nature, une vue magnifique par endroit sur la côte et la ville de Kampot qui mérite franchement le détour. Dommage qu'une forte pluie nous ait surpris avant d'atteindre le sommet. Je crois que le Bokor se mérite et, même si pour s'y rendre, il faut peiner sur 40 kms de montée, ce n'est rien en comparaison du plaisir que procure la vue ou le fait d'aller se baigner dans la cascade de Popokvil .
Lieu saint depuis le XVème siècle, capitale royale avant 1866, désormais lieu de pèlerinage et de culte, Oudong fut détruite le 18 mars 1974 par les Khmers rouges, rasée et la population(20000 habitants) déportée dans différentes directions. Enseignants, fonctionnaires et soldats républicains furent massacrés. C'est dans la ville alors capitale royale, que fut signé le protectorat entre le roi Norodom et l'Amiral de la Grandière le 11 août 1863 et qu'il fut ratifié lors du couronnement de Norodom, le 3 juin 1864.
Oudong est un magnifique endroit où règne calme et verdure; son point de vue exceptionnel à 3600 permet de porter un regard sur la vallée qui rejoint Phnom Penh. Belle promenade à pied à la saison des pluies, la ville donne l'impression d'être sur une Île, à la saison des labours, elle donne une image de vie rurale comme nulle part ailleurs.
Depuis peu le roi Sihanouk y a fait transférer, dans une stupa de 33 mètres qu'il a fait construire les cendres du Bouddha Sakyamouni qu'il a ramenées de Ceylan en 1954 et qui étaient conservées jusqu'à présent dans le Stupa bleu situé devant la gare ferroviaire de Phnom Penh. La route est très abîmée mais les travaux de réfection ont commencé.
Sur mon passage, j'aime regarder les pagodes entourées d'eau recouverte de nénuphars et de jonquilles, quelques élevages de canards apportent un charme particulier à ces endroits religieux, quelques kilomètres avant le virage qui mène à la ville d'Oudong, le village de Chams de Prek kdam ne compte pas moins de quatre mosquées. Ce mélange des cultures et des religions donne un exotisme agréable à la route d'Oudong, site encore mythique où circule autour de sa naissance un bon nombre de légendes.
L'authenticité, on la retrouve du côté de Kompong Speu, les cultures de riz parsemées de palmiers sont animées par les' paysans qui y travaillent sans relâche, ils refont les digues, les canaux, labourent plantent ou coupent les tiges miraculeuses qui donneront les grains indispensables à l'alimentation de base.
Au Cambodge, j'ai trouvé un peu de ce que je cherchais en parcourant les pistes et les routes hors des sentiers touristiques organisés. J'ai découvert un pays authentique, naturel, où l'eau tient une place primordiale tout autant que la nature, même si l'ignorance de certains entraîne une déforestation inquiétante.
Si certains paysages ont plongé mes yeux dans la magie, il en est de même pour ma pensée, alimentée par la poésie et l'histoire de la civilisation khmère, dont un témoignage réel existe toujours à travers la cité des temples, dans ce lieu mythique où chaque porte s'ouvre sur une facette du passé.
Les carrioles tirées traditionnellement par un attelage de deux bœufs sont souvent conduites par des adolescents; pourvues de roues avec des cerceaux de fer, elles laissent leurs empreintes dans les chemins défoncés à cause de leur chargement parfois exagéré. Les enfants ne sont pas« à la noce » dans ce pays, pour manger, ils doivent travailler et aider leur famille. Ils ramassent le bois, gardent le troupeau, les canards, les poules, vident les mares d'eau ou pêchent avec des nasses traditionnelles.
Ils sont employés aussi bien aux champs qu'à d'autres tâches que bien des enfants de nos sociétés occidentales ne voudraient pas exécuter mais dans ce pays certaines familles n'ont pas le choix. Les conditions de vie des enfants khmères n'ont aucun rapport avec celles des enfants occidentaux, elles sont à cent lieues.

Sortie de Phnom Penh vers Takmau
Des Vaches
Vendeuse de noix de coco
Les rizières
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